9/10Conker's bad fur day - Test

/ Critique - écrit par Mandark, le 01/09/2009
Notre verdict : 9/10 - Mondo trasho! (Fiche technique)

Tags : conker bad day nintendo jeux test ecureuil

Marre de cette tête à claque de mascotte de %@/§!? de la caisse d'épargne ? Changez d'avis sur les rongeurs avec Conker's bad fur day !

Comment ? Oui, comment un ovni tel que CBFD a-t-il pu voir le jour sur la N64, Stupid logo!
Stupid logo!
console réputée familiale et grand public ? Présenté dès l’E3 1997 et répondant alors au nom de Conker’s Quest, le titre n’avait à priori rien pour se distinguer des autres jeux de plates formes 3D ; il promettait même d’être mièvre et guimauve à souhait avec son petit écureuil de héros évoluant dans un univers tout kawaii et coloré pour aller délivrer sa compagne. A l’époque cela ne retient l’attention de personne, en partie aussi parce que dans le même temps est présenté
Banjo-Kazooie (des studios Rare également) qui en est à un stade beaucoup plus avancé. Une année passe avant que le jeu ne refasse parler de lui. Un nouveau titre est alors annoncé (Twelve Tales-Conker 64) et le développement du jeu aurait été repris de zéro. Puis de nouveau plus aucune nouvelle jusqu’à janvier 2000 où Nintendo annonce que le jeu sortira bientôt, cette fois-ci sous le titre Conker’s Bad Fur Day. Il est finalement présenté à l’E3 la même année, et là c’est le choc ! Disparu le jeu de plates formes mignounet, Conker s’est transformé en grosse farce violente, scatologique et obscène !

A clockwork squirrel
A clockwork squirrel
Outre son titre (variation sur l’expression anglophone « bad hair day », grosso modo l’équivalent de notre « j’ai les cheveux qui poussent à l’envers ») et sa présentation (où Conker découpe rageusement le logo Nintendo en deux avec une tronçonneuse !), le jeu affiche ostensiblement sa nouvelle orientation en ouvrant sur la reprise du plan d’intro de Orange Mécanique et ne laisse rapidement aucun doute quant à la suite des événements. Passé l’intro nous retrouvons Conker, qui tient maintenant définitivement plus du « crazy squirrel » de Tex Avery que de l’horripilant rongeur de la Caisse d’Epargne, complètement murgé à la sortie du bar où il a passé la nuit à se mettre minable avec ses potes. Il a mal au crâne, il ne marche pas droit et dégueule tous les trois mètres. Bref il est urgent d’aller se pieuter ! Pendant ce temps-là la situation est grave à la cour du roi Panthère : la table sur laquelle il pose habituellement son verre de lait a un pied de cassé ! Après bien des heures d’études face au problème, le scientifique du royaume (à l’accent très Docteur Mabuse) est formel. Pour remplacer la partie défectueuse du mobilier il faut…un écureuil rouge !

Tcha tching!!!
Tcha tching!!!
Ce pitch hautement absurde marque le début d’un des jeux les plus ouvertement trash jamais réalisé et où les développeurs n’ont visiblement pas cherché trente secondes à se censurer. Jugez plutôt : sur le chemin qui doit le ramener à sa maison (et à sa copine Berri, l’archétype de la bimbo blonde qui collerait son oreille contre un mur pour écouter de la house), Conker va croiser un roi abeille bourré et obsédé sexuel (qui cherche à « polliniser » la fleur à forte poitrine du coin), une meule de foin « terminatoresque », des vaches qui ont la diarrhée, des zombies avides de cerveaux, un étron géant chanteur d’opéra à ses heures (« I am the great mighty Poo, and i’m going to throw my shit at you ! ») et bien d’autres plus affreux les uns que les autres qu’il devra soit aider (mais pas pour rien ; notre anti héros l’étant jusqu’au bout c’est tout vénalement qu’il demandera à être rétribué en dollars !), soit affronter (ce qui se terminera très souvent par une explosion de tripes des plus gores). De plus tout ce petit monde parle (une première pour un jeu N64, les dialogues étant jusqu’ici présents sous la forme de textes, support cartouche oblige), ou plutôt devrais-je dire jure. En effet c’est souvent à coups de « bastard » ou d’ « asshole » que les protagonistes du jeu terminent leurs phrases, et même si beaucoup de passages sont bipés on entend sans peine les « cocksucker » et autres « fuck » résonner dans sa tête.


"I am the great mighty Poo!"
Côté gameplay, le soft est aux petits oignons avec une maniabilité impeccable et un level design au top qui reprend tous les standards façon Mario 64 pour mieux les pervertir (comme la vallée de merde, littéralement dégoulinante d’excréments et à la bande son ponctuée de bruits de pets et de déjections !). A certains points précis, indiqués par un gros B (en relation avec le bouton du pad à utiliser), notre sciuridé pourra accomplir certaines actions contextuelles nécessaires à sa progression (toujours dans un esprit décalé bien sûr, comme ce passage où il faut ingurgiter sec plusieurs volumes de bibine avant d’aller, rond comme une queue de pelle, pisser sur quelque diablotin enflammé). Pour le reste il pourra bien entendu sauter, mais aussi planer quelques instants en l’air en se servant de sa queue comme de pâles d’hélicoptère (« the helicoptery thing », sans doute un hommage à Tails de Sonic 2) et assommer ses ennemis à l’aide d’une poêle à frire (qui sera remplacée plus tard par un autrement plus avantageux fusil a pompe à visée laser !). CBFD se fait aussi remarquer par ses graphismes, les plus fins jamais obtenues pour une cartouche N64. Le jeu est en effet le premier à intégrer un éclairage dynamique sur ce support et sa profondeur de champ toujours importante n’est jamais cachée par le fameux « brouillard » que l’on trouve sur tous les autres titres (CBFD à d’ailleurs la réputation d’être la cartouche la plus remplie de données de la ludothèque N64).

Un petit mot également sur le mode multi-joueurs. Très varié, celui-ci permet de se livrer à de nombreux mini jeux entre potes tels que le deathmatch (of course !), mais aussi le mode « heist » (où il faut réussir un braquage de banque !) ou « beach » (où il faut traverser les lignes ennemis lors du débarquement). On trouve aussi un mode « surf » (course sur la lave), et bien d’autres basés sur les nombreuses situations du jeu.

There is no squirrel!
There is no squirrel!
CBFD
est aussi un vrai régal niveau parodies. On y retrouve en effet moult clins d’œil à des jeux ou des films mythiques. Sans rentrer dans le détail, citons pêle-mêle Les dents de la mer, il faut sauver le soldat RyanMatrix, Resident Evil, Street Fighter 2, Reservoir Dogs, Dracula

Cet ensemble fou est soutenu par une bande musicale très jazz « dixieland », parfait contrepoint de cet univers loufoque et méchant.

Conker's bad fur day est beaucoup plus qu’irrévérencieux (Madworld est irrévérencieux, mais c’est clairement un titre pour adultes), c’est ouvertement un gros doigt morveux tendu à la face des conventions polies et commerciales qui régissent la politique de développement de certains éditeurs, Nintendo en tête. Ce qui explique sans nul doute l’embarras de ces derniers au moment de commercialiser CBFD. Le jeu sortira en quantité limitée et, bien qu’encensé par la critique, ne se vendra pas bien aux USA (55 000 exemplaires, largement en dessous des ventes moyennes sur la console à l’époque ; il faut dire que Nintendo ne s’est pas empressé d’en faire la promo), et finalement  big N décidera de ne pas distribuer le soft en Europe et au Japon (officiellement pour raisons de non rentabilité commerciale). L’Europe aura finalement droit à une sortie grâce à THQ, mais le jeu ne sera pas traduit et son prix de vente prohibitif par rapport au tarif moyen des cartouches (600 francs contre 450 habituellement) suffiront à en faire un échec aussi sur le vieux continent.

It's badass time!
It's badass time!
Aujourd’hui devenu culte (et disons le, introuvable, car jamais réédité), CBFD reste un jeu qui détonne de par son attitude « décomplexé du gland » et sa méchanceté qui ne se cherche aucune excuse pour exister. Le genre de titre qui nous rappelle quelque part que dans le monde fascinant du jeu vidéo beaucoup de portes n’ont pas encore été (violemment) enfoncées !

PS : A noter que le jeu fut remasterisé à l’occasion de la sortie de Conker : Live & Reloaded sur Xboite première du nom. Bizarrement, et alors que la console de Crosoft visait plutôt un public de jeunes adultes, cette réédition sera censurée sur de nombreux points.