9.5/10Divinity : Original Sin - l’âge d’or du RPG fait son retour

/ Critique - écrit par Guillom, le 15/09/2014
Notre verdict : 9.5/10 - Divinity : Original Sin, ou le triomphe des i (Fiche technique)

ACHETEZ-LE. Inutile de perdre votre temps à lire une critique, l’essayer, c’est l’adorer ! Y jouer, c’est l’aduler. Alors fermez cette fenêtre, foncez sur Steam ou chez votre revendeur de jeux vidéo préféré et achetez Divinity : Original Sin.

Ah, vous avez cliqué finalement ? Bon, je suppose que je n’ai pas le choix… Juste le temps d’arrêter Divinity et vous l’aurez, votre critique. Mais sachez qu’il est honteux de séparer un joueur (ou une joueuse) d’une telle merveille ! Il doit même y avoir des lois, des principes fondamentaux des Droits de l’Homme contre pareille vilenie. Alors, pourquoi parler aujourd’hui d’un jeu vidéo sorti en juillet? D’abord, il faut plus de deux mois pour progresser un temps soit peu dans l’aventure. Ensuite parce que les Belges de Larian ont développé ce qui peut être considéré aujourd’hui comme un des meilleurs RPG qu’on ait vu depuis des lustres. Etudier chaque détail ne permet pas d’expliquer pourquoi Divinity est si bon… Impossible de mettre l’accent sur un aspect en particulier : le gameplay, les graphisme, le scénario ou encore le world design, tout cela s’imbrique impeccablement et donne vie à un RPG plus efficace que tous les Baldur’s Gate, Titan Quest et Fallout réunis.


Le choc des éléments

Commençons par le commencement, la base de tout RPG digne de ce nom : la création des persos. Celle-ci est, dans Divinity, assez poussée sans être incompréhensible : on sait à quoi chaque statistique correspond (merci les bulles). Je ne parle pas de l’esthétique, qui elle reste extrêmement basique, mais de la fiche de perso. Et oui, comme dans un jeu de rôle papier, il vous faut définir les compétences et capacités de vos héros. Les possibilités sont nombreuses, le joueur n’étant pas obligé de se cantonner à une classe cloisonnée. Il est possible de jouer un personnage adapté à n’importe quel style de jeu : un Chevalier furtif, un Sorcier amateur d’armes à deux mains. Libre à vous de faire vos choix et d’attribuer les aptitudes et les points de compétences selon vos envies. Ne manquent plus qu’un livre de règles de 1500 pages et un Maître de jeu. Heureusement, les algorithmes se chargeront de la narration et du gameplay à votre place. Et ai-je précisé que Divinity se joue à la souris, en cliquant pour se déplacer et attaquer ? ça c’est du old-school ! les amateurs de Call of Duty apprécieront !

Je vous présente donc Grudu, fier Guerrier pyromancien et Gertrude, subtile Ranger spécialisée en magie noire. Nos deux Traque-Source sont désormais prêts à se lancer dans une aventure qui les conduira aux portes de la folie. Ce n’est pas l’humour inhérent à Divinity qui vous malmènera votre santé mentale, mais bien sa difficulté. Nous sommes en présence ici  d’un jeu hardcore comme on n’en fait (presque plus). Nous y reviendrons…

Et on « crafte » tic tac tic tac

Une fois les persos créés, voilà Grudu et Gertrude débarqués sur une plage abandonnée, ou coquillages et crustacés peuvent être ramassés. Et c’est parti pour un scénario whatthefuckesque au possible ! Une palourde géante qui parle, un gardien squelettique implacable, des soudards saoûls, un homme qui murmure à l’oreille des statues… Les premières minutes du jeu vous mettront vite dans le bain et les occasions de se disperser seront innombrables (et bientôt celles d’être dispersé à votre tour). Allons donc enquêter sur le meurtre par implosion d’un échevin cocu…Premier point d’importance : c’est beau. Divinity n’est pas un jeu gourmand, et tourne sur des configs assez faibles. Pourtant, les graphismes n’ont rien à envier à ce qui se fait de mieux ces derniers temps. Les environnements sont variés : cryptes, villes, forêts, déserts, terres désolées… L’exploration occupe une part important du gameplay. D’autant qu’il vous est possible d’interagir avec cet environnement. L’eau et le sang conduisent l’électricité, les nuages de poison explosent au contact du feu, feu qui peut être éteint par l’eau… Les mécaniques de Divinity sont incroyablement riches et offrent une multitude d’approches différentes à chaque problème. Une porte vous bloque ? Crochetez sa serrure, téléportez vous de l’autre côté, cherchez la clé ou bien briser la à grands coups de hache rouillée. Ces interactions jouent également un rôle essentiel lors des combats. Mais nous ne sommes pas encore là.


Tout beau tout chaud

Vos armes s’useront à force d’utilisation, il sera donc nécessaire d’en récupérer sur les corps de vos ennemis, d’en acheter (mais à ce prix là, c’est du vol !) ou alors d’en fabriquer de nouvelles. Le craft (fabrication) est omniprésent dans ce jeu. Tout peut être créé ou réparé, à condition d’avoir les bons composants, ce qui est parfois complexe sachant que ni les ennemis, ni les objets ne respawnent (réapparaissent une fois morts/pris). A force de taper coffres et portes, votre épée s’est brisée ? Une pierre, un bâton et vous voilà avec une hache rudimentaire. Cela sera peu efficace, mais au moins pourrez-vous vous défendre. Les crafts sont débloqués par la lecture de livres de recettes. La littérature abonde : trouver les bons ouvrages vous permettra d’acquérir aussi de nouveaux sorts, de nouvelles compétences… A condition d’avoir le niveau.

Expérience hardcore

Et là, c’est l’épreuve du combattant, l’ascension de l’Everest, la traversée du Pacifique à la nage ! Ne vous attendez pas à ce qu’accomplir la quête consistant à tuer 30 libellules vous permette à elle-seule de gagner un niveau. En outre, aucun PNJ ne vous donnera jamais des quêtes débiles et répétitives consistant à farmer, pour ne pas dire génocider, les petits animaux de la forêt. Au contraire,  la trame narrative est bien écrite, les missions secondaires  intéressantes et variées. Vous pourrez partir à la recherche d’un archéologue encerclé par les morts-vivants, reconstituer l’équipage de ce bon vieux capitaine Jack, sauver les enfants d’un orphelinat en flamme… mais jamais un PNJ ne vous demandera d’accomplir une récolte de baies. Souvent, les quêtes sont accompagnées de choix moraux : laisser un homme affamé voler ce poisson ou non, le dénoncer aux gardes, etc. Vos persos pencheront entre pragmatisme et romantisme, altruiste et égoïste ou téméraire et prudent. Et s’affronteront parfois sur les décisions à prendre. En solo, les débats sont assez simples, vos deux personnages trouveront rapidement un accord. Mais en coop, vous serez fréquemment amené à suivre une voie que vous n’auriez jamais choisie seul. En cas d’impasse, ces discussions se solderont par un du-du-du-duel… à pierre-feuille-ciseaux. Dans Divinity : Original Sin, convaincre quelqu’un de mourir à votre place, ça se joue à chifoumi. C’est drôle, efficace et aléatoire, à l’image du jeu tout entier. C’est bon, vous avez accompli ces quinze quêtes après huit décès, quarante trois respawn et deux ragequit… C’est bien, mais pas suffisant. Si le second niveau est atteint rapidement, après avoir affronté les Orcs qui débarquent devant Cyséal (la première ville du jeu), faire progresser ses personnages s’avère par la suite beaucoup plus difficile. Mais pas de souci, vous reprendrez bien un peu de zombies* ?

PAWAAAAAAA ! Unlimited  PAWAAAAAAAAAaaaa...

Ça y est, on y arrive : la partie cauchemardesque, l’enfer fait jeu… Les combats de Divinity : Original Sin ne sont pas durs, ils sont pires que ça. Larian a sorti jeu exigeant, pour ne pas dire hardcore. Une erreur et c’est la mort assurée**… Et vous allez mourir souvent. A côté, Dark Soul fait figure d’un jeu My Little Pony ! Si l’aventure se déroule en temps réel, les combats, pour leur part, se jouent au tour par tour. A moins de jouer en « Facile », engager un combat sans une préparation optimale relève du suicide pur et simple. Orcs, squelettes, araignées géantes, nécromants, créatures des abîmes… tous se feront un plaisir de vous occire. Par chance, l’environnement sera votre arme, avec quelques objets contondants et tranchants et un bel éventail de sorts dévastateurs. Pour vaincre, il est souvent utile d'exploiter autant que possible les éléments du décor pour s’abriter ou bien pour piéger ses ennemis. Ces teignes de zombis laissent une traînée empoisonnée derrière eux, sur laquelle peuvent passer leurs alliés squelettiques, insensibles au poison. Or, comme indiqué précédemment, feu + poison = BOUM, alors profitez-en. Histoire de vous faciliter un peu la tâche, les flèches traversent vos partenaires sans les blesser. Malheureusement, ce n’est pas le cas des sorts. C’est pourquoi il est nécessaire de coordonner ses attaques pour éviter le tir ami. Malgré tout cela, vous serez toujours désavantagés contre la plupart des ennemis. Ceux-ci sont plus forts, plus gros (comment des Orcs de six mètres de haut peuvent-ils tenir dans de si petits bateaux ?) et vont vous faire très mal à chaque coup. Pensez à recruter de la chair à ca… de fidèles compagnons pour vous appuyer ou, au pire, servir de bouclier.

Parfait ou presque

Evidemment, Divinity n’est pas exempt de défauts. Certains ont été « patchés », comme, par exemple, les erreurs de traduction la version française ou encore l’intégration des voix des PNJ (personnages non joueurs). Il subsiste néanmoins un problème majeur, qui affecte grandement le gameplay : l’interface. Celle-ci n’est absolument pas ergonomique. On s’y perd, on galère… Il m’a fallu plusieurs minutes pour comprendre que, pour découvrir les capacités de certains objets, la compétence Maître du Savoir était nécessaire et qu’il fallait surtout utiliser un miroir magique. A part ça, Divinity est un des meilleurs RPG auquel j’ai joué depuis longtemps. Malheureusement, l’été passé, on peut constater que Divinity n’est plus en tête des ventes.  On ne parle que des Destiny et autres Early Access de certains jeux annoncés lors de l’E3 2014. C’est fort dommage, d’autant que le potentiel de ce RPG est encore exploitable.  Son moteur permet la création de mods (modifications et ajouts  apportés par les joueurs aux graphismes, gameplay ou scénario) sans qu’il soit nécessaire d’être un professionnel du codage. Pourtant, deux mois après sa sortie, on ne compte que 17 mods sur le Steam Workshop. Le jeu n’est pas gourmand et tournera sans difficulté sur une machine plus ancienne… En d’autres termes, Divinity : Original Sin est presque parfait et, malgré un mauvais timing, deviendra assurément une référence pour tout amateur de RPG.

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* On voit généralement les zombis comme des êtres lents, faibles, puissants uniquement par le nombre… Dans Divinity, ils sont rapides, tapent très fort et vous empoisonnent de surcroît.

** Et pourtant, l’équilibre entre frustration et plaisir est là : deux mois plus tard, j’y joue (et perd) encore.