8/10Replay

/ Critique - écrit par camite, le 01/10/2003
Notre verdict : 8/10 - Life Reloaded (Fiche technique)

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Jeff Winston incarne assez bien la figure de l'antihéros : à quarante-trois ans, son métier ne le passionne plus guère et son mariage s'enlise dans la médiocrité et la routine. Sa femme ne peut plus avoir d'enfant et ne s'intéresse de toute façon qu'au rideau de douche qu'il faudrait changer. Mais plus pathétique que tout, Jeff meurt dès le début du livre. Pour un protagoniste, ça la fout un peu mal, quand même. Une horrible douleur dans la poitrine plus tard, il se réveille. Non pas à l'hôpital ou au paradis mais en... 1963, à l'âge de dix-huit ans. Voilà déjà de quoi vous agiter le cervelet. En plus, Jeff se retrouve dans sa vie d'étudiant en se souvenant... de son avenir. Ce qui en multiplie considérablement les horizons.

Paru pour la première fois en 1988, Replay a connu un succès suffisant pour bénéficier par la suite de nombreuses traductions et rééditions. Dont la plus récente par chez nous au début de cet été meurtrier, publiée (ironie du sort) au moment où son auteur Ken Grimwood rejoignait sa fiction (si j'ose dire). Dès le début, le lecteur trouvera quelques éléments laissant penser que le romancier se met en scène dans une histoire cependant purement fictive : comme son personnage principal, il exerce la profession de directeur de l'information, vit en 1988 âgé de quarante-trois ans...

Mais très rapidement, Grimwood chasse ces petites futilités de nos esprits et nous plonge dans une histoire diablement excitante : revenu à un point précis de son existence, Jeff Winston a le choix, mais en connaissance de cause. Pourquoi se fatiguer à travailler lorsque l'on connaît les résultats sportifs des vingt-cinq années à venir ? Retour vers le futur 2 a déjà exploité l'idée mais dans Replay, le héros ne commande pas ses retours en arrière (comme dans le film Un Jour sans fin d'Harold Ramis). Au terme de sa deuxième vie, il meurt encore (à la même date) et se réveille à nouveau dans le passé. Nouveaux choix, nouvelles expériences...

Le roman aurait pu partir sur les chemins sinueux du capharnaüm philosophique, disserter sur le destin ou la théorie du chaos (comment un changement anodin peut chambouler l'histoire du monde), mais Grimwood a préféré nous scotcher à son livre par un style fluide, parfois drôle, et par la dimension humaine de son histoire. Les tribulations du héros offrent de plus une évocation souvent savoureuse de vingt-cinq ans d'histoire contemporaine. Quelques velléités science-fictionesques pointent le bout du nez ça et là (découvrir le pourquoi du phénomène, on pense alors à Werber) mais la conclusion, malheureusement convenue (profiter de la vie tant qu'il est tant, sans blague), laisse le lecteur choisir entre plusieurs interprétations.

Pitch alléchant, rebondissements en pagaille, histoire des Etats-Unis revisitée... De quoi produire une formidable série TV. Enfin moi, j'dis ça j'dis rien hein. En attendant, lisez le livre.